La « Mulatresse » solitude

Illustration Francioli DANCRADE

«Elle laissait éclater, dans toutes les occasions, sa haine et sa fureur…. Solitude n’abandonna pas les rebelles et resta près d’eux, comme leur mauvais génie, pour les exciter aux plus grands forfaits. »

L’Histoire d’une résistante guadeloupéenne

Née vers 1780, la Mulâtresse Solitude fille d’esclave, on la nomme la Mulâtresse Solitude à cause de sa peau claire suite au fruit du viol d’une captive africaine sur le bateau qui se dirigeait vers les Antilles. Solitude de son surnom connaît l’abolition de l’esclavage en 1794.

Du fait de son teint clair, elle fut catégorisée au sein de la société esclavagiste en tant que « mulâtre ». Pour cette raison, elle fut séparée de sa mère pour camarade de jeu des filles du maître. Traumatisée d’avoir été arrachée des bras de sa mère Solitude était murée dans le silence et parlait très rarement.

L’Abolition de 1794, un premier goût de liberté

C’est entre 1789 à 1802 que la Guadeloupe est à son apogée de ses différentes phases de la Révolution car là où la Martinique est occupée par les Anglais de 1794 à 1802, la Guadeloupe reste continuellement française. Les idées divergentes et les diverses classes sociales s’affrontent parallèlement à la multitude d’esclaves qui pose un redoutable problème dans le pays.

Après des pressions établit par la « société des amis des noirs » et d’humanistes comme l’Abbé Grégoire, la convention proclame l’abolition de « l’esclavage des nègres dans toutes les colonies » le 4 février 1794.  

L’esclavage est alors aboli en Guadeloupe mais non pas aboli en Martinique, encore sous contrôle des Anglais.

C’est à la révolution française, avec la première abolition de l’esclavage que Solitude et les noirs des colonies, esclaves et non-esclaves prennent goût à la liberté. Elle connaîtra l’amour à ce moment lors d’une rencontre avec un esclave récemment venu d’Afrique.

Son combat contre le rétablissement de l’esclavage

Mai 1802, Napoléon Bonaparte envoie le général Richepance en Guadeloupe à la tête de 3 500 hommes pour rétablir l’esclavage.

A la tête de 3 500 hommes, celui-ci a reçu pour mission de désarmer tous les soldats de couleur, de déporter les officiers rebelles et de revivifier la discipline chez les anciens esclaves. Dès son arrivée, il ordonne le désarmement des soldats de couleur et les conduit à bord de ses navires.

Un conflit éclate alors entre les troupes Napoléoniennes et des bataillons noirs, menés par les officiers noirs Joseph IGNACE et Louis DELGRES. Cette armée noire est soutenue par une partie de la population et par les « nègres marrons ».

De nombreuses femmes se battent aux côtés des hommes qui se battent contre le rétablissement de l’esclavage, elles transportent les munitions, soignent les blessés…, Solitude, enceinte de quelques mois de son compagnon, qui se bat comme elle, rejoint le combat. Malgré sa grossesse elle s’arma d’un pistolet et participa à tous les combats, de même que la compagne de Louis Delgrès, Marthe-Rose. 

L’acte du désespoir

Ce combat inégal durera plus de 18 jours , traqués par l’ennemi, Louis DELGRES et ses troupes se retranchent au Matouba et minent la demeure où ils sont, dans un ultime sacrifice, préférant « La mort plutôt que l’esclavage ! ». Le 28 mai, la maison où sont retranchés entre 300 et 500 hommes, explose à l’approche des soldats de Richepance, entrainant leur propre mort, mais aussi celles de quelques hommes de l’armée Napoléonienne.

Solitude survivra à la bataille du 8 Mai 1802 mais en route pour rejoindre le reste de la résistance, elle fut capturée et emprisonnée. Elle ne sera pas exécutée directement en raison de sa grossesse. 

Solitude accouche le 28 novembre 1802, d’un petit garçon qui nait esclave. Elle n’est exécutée par pendaison que le 29 novembre de la même année par ordre de la France de Bonaparte redevenue esclavagiste, le lendemain de son accouchement. Elle a trente ans.

Mémoire de la femme combattante de Guadeloupe

Figure féminine de cette insurrection, elle est l’une des figures inoubliables des révoltes de 1802 contre le rétablissement de l’autorité de Lacrosse sous la gouverne de Napoléon Bonaparte.

En 1999, une statue de Jacky Poulier est dressée à sa mémoire au carrefour de Lacroix, sur le boulevard des Héros aux Abymes en Guadeloupe.

En 2007, une statue a été instituée à Bagneux (Hauts-de-Seine) à l’occasion de la commémoration de l’abolition de l’esclavage et de la traite négrière (Bagneux étant jumelée avec la ville de Grand-Bourg située sur l’île de Marie-Galante). Cette œuvre, par le sculpteur Nicolas Alquin, « le premier mémorial au monde dédié à tous les esclaves résistants ».

Statue en l’hommage de la Mulâtresse Solitude

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