Paulette Nardal

« Césaire et Senghor ont repris des idées que nous avons brandies, et les ont exprimées avec beaucoup plus d’étincelle, nous étions que des femmes, nous avons balisé la piste pour les hommes. » 

Précurseuse de la négritude

Sa jeunesse

Paulette Nardal est née le 12 octobre 1896 à Le François, en Martinique, de Louise (née Achille) et de Paul Nardal. Son père était un ingénieur des travaux publics et sa mère était professeur de piano. Elle était l’aînée de sept sœurs de la famille, qui faisait partie de la petite communauté noire de la classe moyenne supérieure de l’île. Elle fréquenta l’école du Colonial College pour filles et étudia l’anglais aux Antilles. Après avoir obtenu son diplôme d’études secondaires, Nardal est devenue enseignante, néanmoins elle décida de poursuivre ses études à Paris. 

Après ses études en Martinique, Paulette arrive à Paris en 1920 alors âgée de 24 ans, elle devient la première étudiante noire de Martinique à la Sorbonne afin d’étudier l’anglais. Elle sut rapidement s’impliquer dans le cercle artistique de l’intelligentsia française, sous l’influence des écrivains de la Renaissance de Harlem. 

À la fin de ses études, Paulette Nardal a présenté une thèse sur Harriet Beecher Stowe, femme de lettres américaine, principalement connue pour être l’auteur de La Case de l’oncle Tom, qui porte un sérieux coup à l’esclavagisme. Ce travail l’introduit à la lutte intellectuelle des Noirs aux États-Unis.

Le Salon Clamart

C’est à la fin de ses études que Paulette fut rejoint à Paris par ses soeurs Jane et Andrée. En 1929, les trois soeurs Nardal décidèrent d’ouvrir un salon parisien appelé Le Salon de Clamart. Ce salon était également un lieu de rassemblement où les intellectuels noirs d’Afrique, des Caraïbes et des États-Unis conféraient, créaient des réseaux et délibéraient sur la condition des Noirs, dominée à cette époque par le colonialisme en Afrique et la discrimination raciale aux États-Unis et aux Antilles.

Parmi les nombreux intellectuels et artistes noirs qui ont visité le salon on pouvait compter Jean-Price Mars, René Maran, Marian Anderson et Marcus Garvey. Parmi les visiteurs, figuraient également Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor et Léon Gontran Damas, considérés comme étant les Pères fondateurs du mouvement Negritude. Les historiens concèdent cependant au Salon de Clamart la création d’un environnement intellectuel à l’origine des idées majeures associées au concept de la négritude et du mouvement de négritude qui suivit. 

Ainsi en 1931, les sœurs Nardal utilisèrent le salon pour créer la revue intellectuelle La revue du monde noir. Ephémère parution de six numéros. On y trouve des poèmes, des revues de presse, des articles d’actualité et des réflexions sur la place des Noirs dans le monde, particulièrement dans la société coloniale. Bien que l’activité n’ait été que de courte durée (1931-1932), elle permit à Paulette d’acquérir une réputation pour ses articles traitant de la condition des femmes noires au sein de la diaspora.

Paulette Nardal s’éveilla à ce qu’elle et Jane appelèrent la «conscience noire».

«Quand je suis arrivée, je n’étais que mademoiselle Nardal. C’est en France que j’ai pris conscience de ma différence. Il y a certaines choses qui me l’ont fait sentir, et puis il ne faut pas oublier que nous avons été élevées dans l’admiration de toutes les œuvres produites par les Occidentaux. Inutile de vous dire à quel point j’ai été heureuse et fière de voir comment les Parisiens, les Français pouvaient vibrer devant ces productions noires».

Féministe intersectionnelle avant l’heure

A son retour de Martinique, Paulette mit en place des écoles maternelles pour éduquer les enfants de mères qui travaillent, oeuvra pour le suffrage et lorsque les femmes obtinrent le droit de vote en 1944, Paulette les persuada à assumer le rôle politique et à œuvrer pour résoudre les problèmes sociaux. Elle fonda l’Association « Rassemblement féminin », qui cible les femmes libérales professionnelles. En 1945, elle fonda un journal, La femme dans la ville.

En 1946, Paulette fut nommée pour siéger aux Nations Unies. Elle exerça à New York les fonctions de spécialiste de secteur. Elle fut aussi la première femme noire à occuper un poste officiel à la Division des territoires non autonomes et servi pendant 18 mois. De retour en Martinique en 1948, elle prépara une histoire avec l’aide de sa soeur Alice sur le patrimoine musical de la Martinique en fondant une chorale pour promouvoir et préserver la musique traditionnelle africaine.

Paulette Nardal écrit également sur les revendications du «féminisme noir», dont elle est la figure de proue. Elle estimait que bien avant les hommes, plutôt bien insérés socialement en métropole, ce sont les femmes antillaises qui ont ressenti le besoin d’une solidarité raciale.

Cette architecte oubliée de la négritude était une résistante et battante pour la cause des femmes mais aussi du point de vue de la pensée littéraire, artistique et philosophique.

Paulette est décédée le 16 février 1985 à Marinique. A titre posthume, Jil Servant a réalisé un film biographique en collaboration avec France-Antilles T.V. en 2004 intitulé Paulette Nardal, La fierté d’être négresse (Paulette Nardal, fière d’être une femme noire) sur sa vie.

Le charme du passé c’est l’oubli

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